[Etude] Le bouleau - 2
Pour ce qui est de la symbolique, les livres de Jacques Brosse sont utiles :
dans sa Mythologie des arbres (ch2, « L'échelle mystique »), on lit que l'arbre cosmique en Asie du Nord est traditionnellement un sapin, mais que pour les chamans sibériens, c'est un bouleau qui remplit ce rôle. Pour les Bouriates, les bouleaux abritent l'âme des ancêtres, et lors de la cérémonie d'initiation du chaman, 9 bouleaux sont coupés. Le plus grand est fiché en terre dans la yourte, et est nommé « Gardien de la porte », car c'est lui qui ouvre au chaman l'entrée du ciel. Le bouleau est fortement associé au chiffre 9 ― toujours chez les Bouriates ― puisque 9 bouleaux sont coupés, et le chaman intronisé doit faire 9 entailles au sommet de chaque bouleau.
Le bouleau est donc l'échelle pour grimper au ciel. Je cite ensuite le dernier paragraphe de cette partie, et souligne la fin parce que je la trouve juste et jolie :)
« Pourquoi le bouleau joue-t-il un tel rôle, plutôt que le sapin, par exemple, souvent considéré par les peuples du Nord de l'Asie comme l'Arbre cosmique ? Il est en effet loin d'avoir sa haute taille, Betula verrucosa Ehrh. ne dépasse pas 25 mètres, Betula pubescens est un peu plus petit, 15-20 mètres. Si leur croissance est rapide, ils ne vivent pas plus d'une centaine d'années, alors que le sapin peut atteuindre au moins 700 ans. Seulement, outre sa légèreté, son élégance, la beauté de son écorce d'un blanc argenté, de plus en plus pur vers la cime, le bouleau possède des qualités que lui reconnaissent toutes les traditions. C'est essentiellement un arbre de lumière. »
Jacques Brosse, Mythologie des arbres ; ch.2, "L'échelle mystique", Sainte Brigitte et la Chandeleur :
« Aussi bien, dans l'"Alphabet des arbres", le calendrier sacré des Celtes, est-ce le bouleau qui préside au premier mois de l'année solaire (du 24 décembre au 21 janvier). Le bouleau est donc en rapport avec la renaissance du soleil. Bien que généralement consacré à la lune, sa peau délicate évoquant l'éclat argenté de la pleine lune, il l'est parfois au soleil et à la lune, mais, dans ce cas, il est double, mâle et femelle. Lors de la fête qui célèbre la remontée de la lumière, notre Chandeleur, le bouleau est particulièrement à l'honneur, en la personne de sainte Brigitte, dont le nom, Birgit, vient de la racine indo-européenne Bhirg, le bouleau, qui a donné birch en anglais et die Birke en allemand. Sainte Brigitte de Kildare, née dans la seconde moitié du Ve siècle, donnée par ses hagiographe comme la fille d'un chef de clan païen devenue l'une des patronnes de l'Irlande, était à l'origine une ancienne divinité celtique de la renaissance du feu et de la végétation, la propre fille de Dagda, le dieu suprême vénéré par les druides irlandais. [...] En Angleterre, on entretenait un feu perpétuel dans le temple d'une déess que les Romains identifiaient à Minerve, mais qui était en fait Birgit, à la fois guérisseuse et patronne des bardes -- lesquels peuvent être, à certains égards, comparés aux chamans -- et des forgerons. [...]
La sainte Brigitte ouvrait le mois de février qui, de toute antiquité, était celui des purifications. En latin, februare signifie "purifier, faire des expiations religieuses".[...]
Dans la mythologie germanique, le bouleau était l'arbre de Donar-Thor, dieu de la foudre et de la guerre, considéré comme la divinité suprême, plus puissante qu'Odin lui-même, dans les pays du nord, particulièrement en Norvège. On sait que dans le folklore russe, le bouleau joue un rôle important. Chez les Germano-Scandinaves ou les populations altaïques, comme chez les Celtes ou les Slaves du Nord, les croyances concernant ses propriétés sont à peu près identiques. Selon les proverbes russes recuillis par Dal, le bouleau fait bien quatre choses : il donne la lumière au monde, il étouffe les cris, il guérit les maladies, enfin il nettoie, ce qui correspond à ses quatre principales utilisations : de ses branches, on fait des torches, car elles donnent de grandes flammes claires, aisin que des balais et les verges dont on se fustige le corps dans les saunas scandinaves comme dans les bains de vapeur russes. Du bois de bouleau, on tire le goudron qui empêche les roues des chariots de grincer. Enfin, sa sève, le "sang de bouleau", est très utilisée dans la thérapeutique populaire et aujourd'hui en phytothérapie ».