Carte postale de printemps
Choses qui font que la journée
commence belle :
la caresse du soleil sur les bras
qui fait
frissonner la peau
du contraste avec l'air frais
le souvenir du nuage blanc
l'odeur du seringat
perceptible bien avant que de voir
l'arbuste
et sa cascade d'albâtre et d'or
les tartines de pain à la farine
bio
grillées
beurrées généreusement
confiturées plus généreusement
encore
de marmelade d'abricots au rhum
le croquant
le fondant
l'acidulé léger de soleil en pot
Se souvenir -- et pourquoi se souvenir
de cela maintenant ? --
que les Japonais torturent les arbres
pour les nanifier
les plier à leur volonté
d'imitation de la nature
et pour cela
les dépouillent de leurs
feuilles
forcent leur croissance en formes torturées
pincent les feuilles épargnées
en bout de branche
-- par sympathie
se faire arbre grand
élancé
fier et libre
flamme de tronc droit et souple
jet net
jeté à la face des hommes
les feuilles en fouillis d'ombre et
lumière
les branches en exubérance
sauvage
un bouleau blanc
un hêtre gris
un noisetier roux
un chêne brun
un saule blond
fiers élans vers le ciel
et pourtant humbles dans leur façon
de donner la fraîcheur
-- promettre à la nature
aux
arbres
au monde
de ne jamais avoir de bonsaï
hérésie humaine
ni de jardin japonais
à part pour une chose :
les dalles de pierres blanches dans
l'herbe verte
Pour le reste
préférer les envolées sauvages d'une prairie
champêtre
les accords en coquelicot majeur
le rouge
fougueux passionné
mais léger pourtant
bonne humeur folâtre
entre les grandes herbes folles
les odeurs de foin vert encore sur pied
et en bordure un mur de rosiers
sauvageons
églantines légères en liane